Le mois de Novembre est traditionnellement le mois des indulgences.
« Indulgences« ; le mot seul est ignoré, ou négatif. Pourquoi?
1) D’abord parce que l’au-delà (certitude d’une vie après la mort) a disparu de notre horizon de pensée. « Je préfère le vin d’ici à l’au-delà« ; le trait d’humour de Francis Blanche a fait florès…
2) Ensuite parce que les fins dernières (la vie éternelle, le ciel, le purgatoire et l’enfer) ne sont plus prêchées aujourd’hui. La seule perspective, le seul projet semble être de « réaliser le paradis sur terre« . Le message du Christ et de l’Eglise est réduit à une soupe d’altruisme vague et d’épicurisme soft; bien être, épanouissement, vivre ensemble. L’équilibre du plaisir et de la peine… La seule chose à sauver étant, bien sûr,… la planète.
3) Enfin, une certaine histoire (en fait assez récente, au 19° siècle) réduit les indulgences à une « monnaie du pape« , invention fausse, lucrative et commode pour renflouer les caisses de la Cité du Vatican. Les objections les plus sérieuses sont formulées auparavant par le moine augustin et prêtre (ensuite hérétique, défroqué et marié) Luther; « On ne saurait trop se garder de ces hommes qui disent que les indulgences du Pape sont le don inestimable de Dieu par lequel l’homme est réconcilié avec lui. (…) Les trésors de l’Eglise … ne sont certes pas des biens temporels [ni] non plus les mérites de Christ et des saints (…) Il est chimérique de se confier aux indulgences pour le salut, quand même le commissaire du Pape ou le Pape lui-même y mettraient leur âme en gage. » (95 Thèses de Wittemberg).
Que répondre à cela?
1) Si l’homme est autre chose qu’une quantité de matière traversée d’ondes électriques et de processus chimiques, alors l’au-delà est hautement probable. S’il peut réfléchir, aimer, vouloir, choisir, comprendre, c’est qu’il est corps et âme (esprit). Or ce qui est spirituel ne meurt pas. L’existence de l’âme immortelle est une certitude démontrée dès la philosophie antique païenne. Et le Christ pose nettement la question; « Que servirait à l’homme de gagner l’univers s’il venait à perdre son âme? Que donnerait l’homme en échange de son âme? » (Matt XVI, 26 – Mc VIII, 36).
2) Il existe bel et bien un enseignement précis et révélé sur les fins dernières; la mort et le jugement, le ciel et le purgatoire, l’enfer. De cet enseignement découle les indulgences et la pratique de l’Eglise.
3) L’histoire est une science des faits, pas des a priori. Il y a eu des abus averés, des mots malheureux sur les indulgences. « Dès que l’argent sonne dans le panier du quêteur (pour l’oeuvre indulgenciée), l’âme monte au ciel« … Cependant ces abus ne suppriment pas la verité des indulgences et l’efficacité de cette pratique dans la vie de l’Eglise. Elles ont été rappelées par l’Eglise récemment (Paul VI, Constitution apostolique Indulgentiarum Doctrina, 1° janvier 1967).
Qu’est-ce que le purgatoire?
Le purgatoire est l’état de ceux qui meurent dans l’amitié divine, mais qui, tout en étant assurés de leur salut éternel, ont encore besoin de purification pour entrer dans la béatitude du ciel (Compendium, n° 210).
Qu’est-ce que l’indulgence ?
L’indulgence est la remise partielle ou plénière (totale) de la peine restant due pour les péchés commis durant cette vie.
La sainteté de Dieu et le péché.
Dieu est le bien souverain et la fin ultime de la vie humaine. Le péché est un acte volontaire qui dévie de cette fin ultime ; on préfère un bien créé à Dieu, on se détourne de Dieu.
La rémission des péchés par la Passion du Christ.
Mais dans sa miséricorde, le Christ est venu nous acquerir par sa Passion la pleine rémission des péchés.
Cette pleine rémission des péchés comprend ;
- l’effacement de la faute (par l’acte de contrition et la confession sacramentelle)
- et l’acquittement de la peine restant due pour compenser le désordre introduit par le péché (par les actes de charité, notamment l’offrande des peines de la vie terrestre, en union avec les souffrances du Christ).
La miséricorde divine s’exerce donc sur ces 2 points, en nous donnant de quoi rentrer dans la justice de Dieu, dans son amitié et sa paix.
Cette pleine « rémission des péchés » (article de foi du Credo) peut se faire en cette vie ou après la mort. Avec une différence, fort bien exprimée par le Père Lacordaire; « ici, on paye à crédit; au Purgatoire, on paye comptant » (Et le Père Lacordaire ne parle pas d’argent, bien sûr!)
La communication des bienfaits divins dans l’Eglise.
Nous ne sommes pas des individus isolés ; le baptême nous a inseré dans le Corps mystique du Christ qui est l’Eglise. Ainsi, il y a union des membres avec le Christ, et entre eux. Ce lien permet également l’échange de biens spirituels, le soutien mutuel. C’est la communion des saints, entre le ciel, la terre et le purgatoire.
Ainsi, nous pouvons puiser dans le trésor spirituel de l’Eglise pour appliquer aux âmes du Purgatoire la remise de la peine due pour le péché. L’indulgence puise dans le « trop plein » des grâces, des prières et des mérites du Christ, de l’Eglise et des saints. Les âmes du Purgatoire ne peuvent rien pour elles-mêmes (elles sont « passives » dans les peines purificatrices du Purgatoire, qui les préparent à la Vision de Dieu). Elles peuvent quelquechose pour nous, et nous pour elles. N’est-ce pas merveilleux?
En vertu de la communion des saints, les fidèles qui sont encore en pèlerinage sur la terre peuvent aider les âmes du purgatoire, en offrant pour elles des prières de suffrage, en particulier le Sacrifice eucharistique, mais aussi des aumônes, des indulgences et des œuvres de pénitence. (Compendium, n° 211)
N’oublions pas, une fois encore, que Dieu est la sainteté-même, la perfection infinie, et que rien ne peut lui être uni complètement sans être revêtu de cette sainteté. « Si une âme entrait dans la gloire du Ciel sans être pleinement purifiée, en voyant la sainteté de Dieu, elle serait tellement confuse qu’elle irait d’elle-même se plonger en Purgatoire pour achever d’être purifiée » (Ste Catherine de Gênes).
Quelles sont les conditions pour obtenir l’indulgence ?
*être baptisé catholique, en état de grâce.
*être entièrement détaché de tout péché, même véniel (la bonne confession sacramentelle peut mettre cette disposition dans nos âmes).
* se confesser sacramentellement (avant d’accomplir l’oeuvre fixée par l’Eglise).
* Communier sacrementellement (dans les 8 jours précédant ou suivant l’accomplissement de l’oeuvre).
* accomplir l’oeuvre fixée par l’Eglise.
* y joindre la prière pour le Souverain Pontife (par exemple ; Credo, Pater, Ave, Gloria Patri).
Conditions particulières au mois de novembre.
Tout fidèle baptisé peut obtenir 1 indulgence plénière applicable à un (e) défunt (e), du 1° au 8 novembre. Pour cela, outre les conditions générales (voir plus haut), il faut visiter un cimetière et prier sur la tombe d’un défunt.
Enfin, et plus largement, rappelons-nous que tout acte de charité, de pénitence, toute peine (même celle du simple devoir d’état) peut être offert avec l’intention de gagner l’indugence pour une âme du Purgatoire.
Cette verité est consolante, elle nous donne de quoi soulager ces âmes, et hâter leur entrée dans le bonheur éternel du ciel. « Ayez pitié de moi, ayez pitié de moi, au moins vous, qui êtes mes amis ! » (Job).
Elle nous encourage également aux œuvres de piété et de charité chrétienne.
Renouvelons souvent, au cours de ce mois, l’intention « virtuelle » (efficace) d’accomplir cette œuvre de miséricorde. Profitons des permanences de confession offertes, et de la possibilité de visiter un cimetière ce dimanche ou dans la semaine qui suit.
Que par la miséricorde de Dieu, les âmes des fidèles trépassés reposent en paix, ainsi soit-il!