Au commencement, le Verbe, le verbe auprès de Dieu, le Verbe Dieu.
Le Verbe… C’est le nom de Dieu. De la 2° Personne de la Trinité.
La parole mûrit d’abord, elle existe caché, dans le cœur, le sein de l’homme. Puis elle sort, elle s’exprime, elle retentit, elle vient frapper l’oreille, éclairer l’intelligence, remuer le cœur de l’auditeur. Ainsi du Verbe de Dieu.
Cependant, nous ne sommes pas notre parole. Dieu, si. Le Christ est la Parole éternelle de Dieu, la connaissance de Dieu.
Et cette Parole peut être ecoutée. Elle est descendue jusqu’à nous. Elle s’est incarnée.
Le Verbe s’est fait chair… Il a habité parmi nous. De sa plénitude nous avons tous reçu…
Le Verbe se fait chair pour se donner à nous, et pour que nous le donnions à Dieu. Communion, union au Verbe de Dieu. Sacrifice de la Messe, offrande à Dieu de la seul réalité strictement digne de Lui.
Le Verbe se fait chair aussi pour se dire à nous. La divine Parole va alors s’exprimer en paroles humaines, dans notre langage qu’il apprend et qu’il prend. Voilà ce que nous avons reçu. Nous possédons Jésus, nous possédons les paroles de Jésus.
Nous les possédons, mais nous ne les comprenons pas. Pas tout de suite, pas toujours. Combien de fois, nous dit l’Evangile, les proches de Jésus n’ont pas compris ses paroles. Même la Sainte Vierge, même St Joseph, même les Apôtres. Puis, plus tard…
Nous les possédons, mais nous ne les vivons pas. A une âme qui se plaignait excessivement, Saint François de Sales répondait avec douceur ; « Vous savez Jésus crucifié, et vous ne faites pas ».
Nous les possédons, ou du moins elles nous sont offertes, tant et tant… a la messe, au catéchisme, dans la lecture, la méditation, dans l’enseignement de l’Eglise qui les garde et les explique, dans la vie de l’Eglise qui les maintient et les rappelle.
Les saints sont comme de vivantes paroles de Dieu. Les saints ne possèdent pas les paroles de Jésus, ils sont possédés par les paroles de Jésus. Nous savons un peu cela.. Il y a des mots entendus, parfois des silences, qui nous ont changé en profondeur. Sur le moment, ou plus tard…. nous avons lu ou entendu ou chanté ; Ne crains pas… et nous avons été plongés dans la force et la tranquilité de Dieu. Combien puissante la parole divine ! « Ma parole, celle qui est sorti de ma bouche, ne reviendra pas à moi sans porter de fruit ». Le pape émérite Benoit XVI nous le rappelle ; la parole divine, toute parole divine, tout mot sorti de la bouche et du cœur de Jésus est puissante. Le message chrétien n’est pas une information – on pourrait dire, une information de plus ou de moins, une information de trop… C’est une transformation. L’enseignement de Jésus qui a son écho fidèle dans la voix de l’Eglise, ce n’est pas informatif, c’est performatif. L’Esprit Saint Lui-même ne dit pas autre chose que Jésus, Il nous redit les paroles de Jésus. Il nous les dit au-dedans, il nous fait entrer dedans par la science et l’intelligence. Intus legere, c’est lire du dedans. Un jour nous avons entendu et appris « ceci est mon Corps, ceci est mon Sang… l’Eucharistie contient vraiment, réellement, substantiellement le Corps, le Sang, l’âme, la divinité de Jésus, sous les apparences du pain et du vin ». et puis, un autre jour, à l’instant favorable, marqué par Dieu, nous sommes entrés dans cette réalité de la présence eucharistique de Jésus.
Dieu nous parle, et c’est terrifiant. La Parole divine tombe sur notre âme, tantôt comme une rosée, tantôt comme une foudre.
Dieu parle… intérieurement à l’âme dans la foi, dans la prière. Extérieurement par l’Eglise, son Magistère, son catéchisme, sa prédication. Par les évènements. Dieu parle en agissant et transformant intérieurement, en purifiant, en redressant, en corrigeant. Comme la parole du Maître de la vigne, qui récompense et reprend l’ouvrier jaloux.
Pour conclure, nous devons nous interroger et nous examiner sur la parole et le silence. Sur la place que nous leur donnons, la valeur que nous leur accordons. Quelle valeur j’accorde à la Parole divine? Quelle place, quelle fréquentation ? Quelle qualité d’écoute ? Cela peut être le sermon, les textes du jour, les conférences, la lecture spirituelle. Ce n’est pas quantitatif ; on peut entendre beaucoup et retenir peu, et profiter moins encore. C’est qualitatif.
Quel usage je fais de la parole ? Soyons exigeants. Dieu, Lui, le sera. « Au jour du jugement, les hommes rendront compte de toute parole vaine ». « Celui qui sait maitriser pleinement sa parole, mettre un frein à sa bouche, celui-là est un homme parfait ». « Nous ne soupçonnons pas le prix d’une bonne parole. Elle résonne jusque dans l’éternité ».
Quelle pratique, quelle place a le silence dans ma vie ? Jésus a donné une place au silence ; la première, et peut-être la plus grande. 30 ans à se taire, 3 ans à parler. 3 heures sur la croix, 7 paroles seulement, et de quel prix ! Je me rappelle un jeune étonné qui me disait un jour ; Monsieur l’abbé, pourquoi est-ce si important, le silence ? Pourquoi insistez-vous tant là-dessus ? Parce que c’est dans le silence qu’on reçoit en profondeur la parole divine, et qu’on mûrit une réponse valable à cette parole ; la prière, la transmission de la foi. Parce qu’enfin notre monde est de bruit, d’agitation, d’information sans ordre, sans suite, sans mesure, et souvent sans intérêt!
Il est bon qu’en vue du carême, chacun puisse reconquérir une plage suffisante de silence. Silence extérieur; moins d’écran, tel créneau sans portable ou ordinateur, une minute à se taire avant la messe ou après, au début, ou dans le cours, ou à la fin de la journée… Silence intérieur où Dieu se rend présent, aime, agit, pardonne, purifie, éclaire, reprend, appelle, console.
Apprenez-moi, Seigneur, à faire, à refaire ce grand silence qui ouvre les écluses de vos conversations. Apprenez-moi cette attention paisible, aimante, retrouvée à vous.
Marie a accueilli, gardé, médité et vécu les paroles de Jésus. Qu’elle nous aide à écouter, recevoir, méditer et vivre les 7 paroles de Jésus en croix en cette suite de sermons, ainsi soit-il.