Chers fidèles,
Voici (une fois n’est pas coutume) une petite revue de presse avec quelques fortes paroles épiscopales. Dans le prolongement du Dimanche du Bon Pasteur, c’est de bon aloi!
28 avr.Mgr M Aillet, Evêque de Bayonne; «Je ne crois pas qu’on puisse capituler sans discussion devant ce qui apparaît comme un manque grave de respect envers les catholiques. Nous sommes des gens responsables, capables, autant que les commerçants et les conservateurs de musées, de prendre des précautions sanitaires.»
28 avr.Mgr Ginoux, Evêque de Montauban; «Culte public interdit = cas de conscience. On ne peut pas priver nos fidèles de la nourriture essentielle qu’est la grâce sacramentelle. Donc nous les nourrirons.»
28 avril, Mgr Matthieu Rougé, Evêque de Nanterre : «La manière de traiter les religions dans ce déconfinement n’est pas respectueuse». Pour l’évêque de Nanterre, le Premier ministre a repoussé la reprise des cultes au 2 juin prochain avec «une brutalité incompréhensible». Il dénonce une attitude «indigne de notre démocratie».
28 avril, Mgr Le Gall, Archevêque de Toulouse. «Je veux d’abord redire mon accord profond avec le Premier ministre pour rompre la «chaine virale» dont il a parlé à l’Assemblée nationale. Je soutiens aussi la «chaine de solidarité» évoquée par Édouard Philippe et à laquelle nous participons généreusement. Je crois au civisme et au fait que les catholiques peuvent apporter beaucoup à la vie sociale. Cela dit, je suis vraiment indigné à l’idée que les cultes ne puissent reprendre avant le 2 juin prochain… dans le meilleur des cas. Cela fait plus de 8 semaines que nous sommes privés de célébrations publiques! D’où vient mon indignation? Tous les commerces vont rouvrir le 11 mai, sauf les cafés et les restaurants, moyennant le respect des consignes sanitaires. En tant qu’évêque, je suis d’accord pour prendre toutes les précautions nécessaires, pour assurer la distanciation physique dans les églises, prendre des masques, etc. Dans le diocèse de Toulouse, nous comprenons que nos grandes célébrations publiques ne seront pas possibles avant l’automne. (…) J’ajoute que les régions ne sont pas semblables entre elles, comme l’a remarqué le Premier ministre. L’Occitanie n’est pas l’Ile de France ou le Grand Est concernant le nombre de cas de coronavirus. Pourquoi des règles absolues et drastiques sur tout le territoire sans discernement? Ma crainte pour l’avenir est simple. Devant le caractère inacceptable de cette attente sacramentelle qui n’en finit pas pour les fidèles, des célébrations clandestines vont se mettre en place! Le résultat sera pire finalement. Les pouvoirs publics vont essayer de les interdire, mais on passera outre en certains lieux. Il aurait mieux valu autoriser le culte public progressivement et calmement, en nombre limité, comme nous l’avions proposé au gouvernement. Nous n’avons pas été entendus. Cette interdiction prolongée du culte va entamer gravement notre confiance en ceux qui nous dirigent.» Je veux juste faire remarquer au gouvernement que les paroisses sont aussi capables que les commerces de faire observer les consignes sanitaires. Le gouvernement justifie l’ouverture des commerces par la nécessité de relancer l’activité économique. Et il a raison. Si la vie économique est vitale, la nourriture de la foi l’est tout autant. Je veux insister sur ce parallèle : l’économie doit repartir, mais la vie sacramentelle doit repartir elle aussi! Elle est pour nous vitale, alimentaire.«
28 avr.Mgr Michel Aupetit, Archeveque de Paris : «Restons des gens obéissants, c’est-à-dire intelligents, qui répondent de manière adéquate à ce qu’on leur demande. Obéissance n’est pas soumission»
29 avril, Mgr Christory, Evêque de Chartres, Message aux diocésains; « Beaucoup de fidèles expriment aujourd’hui leur tristesse face aux décisions du gouvernement. Nous ne sommes pas considérés comme des personnes responsables, notre engagement à la juste vigilance et à la liberté, comme Assemblée des évêques, pour célébrer avec soin et ne pas provoquer une contagion n’est pas entendu. Ces restrictions touchent la liberté de culte. Elles ne peuvent se justifier par la raison, elles sont l’expression de la non-considération de la vie spirituelle et religieuse des personnes vue comme non-essentielle pour vivre tout simplement ».
Moralité;
Soutenons nos évêques courageux, dans leur indignation et leur action de recours. Prions aussi pour eux.
Rejoignons les actions concrètes de protestation envisagées auprès du pouvoir civil. Cohésion, compétence, prudence et audace. L’union fait la force.
Faisons connaître nos besoins spirituels à nos pasteurs, avec discrétion et simplicité. Respectons les consignes sanitaires, prenons les occasions possibles de recourir aux grâces des sacrements, ici et maintenant.
N’abusons pas des discours providentialistes. C’est très essentiel de croire à la grâce de Dieu dans les pires traverses. C’est aussi essentiel d’y coopérer. « Il y a un abandon qui vient de paresse et de lâcheté, et un autre qui vient de piété et de force » (Bossuet). Entre les 2, il faut choisir. Cela vaut pour les éventuelles démarches et recours. Mais cela vaut aussi, au présent de l’indicatif, si je puis dire, pour demander (et prendre) les moyens de vie spirituelle dans toute la mesure possible. Les églises restent ouvertes; est-ce que j’en profite? Régulièrement? Il existe encore (ou de nouveau) des possibilités de communion et confession sacramentelle; ai-je pensé à faire mes Pâques? Le Saint Sacrement est exposé; ai-je réservé un temps pour m’y rendre, ou fait glisser par un énième tweet, post, sms? Une avalanche de conférences, topos, catéchismes, prières circulent sur internet; ai-je pris le nécessaire spirituel pour moi et ceux qui me sont confiés? Des malades et des mourants sont sans soin spirituel, sans possibilité de recevoir le prêtre et les sacrements; quelle place ont-ils dans mes intentions de prière?
Je conclue par un apologue; en baie du Mont Saint Michel, un éleveur du pays m’a dit un jour; « lorsqu’un cheval se perdait autrefois dans une lise (zone de sables mouvants), il y avait 2 issues possibles; il s’agitait violemment un instant, sans ordre ni efficacité, puis se laissait mourir – ou bien il pataugeait longuement mais sans relâcher son effort et s’en sortait« .
Une fois encore, « Dieu fait tout servir au bien de ceux qui l’aiment » (St Paul). Et je ne doute pas de sa grâce. Je me demande seulement à quel « cheval » spirituel ressembleront les catholiques de France, vous et moi. J’espère que nous aurons « parié sur le bon cheval« !
vd abbé Alexis Garnier